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La Trans-Gascogne 2022

    Ecumer les ports des côtes atlantiques et de la manche d’Oléron au Cap Fréhel, accoster dans toutes les îles du Ponant, traverser la Manche pour aller aux îles Scilly, « faire » les Anglo-Normandes, toutes ces navigations ont déjà été proposées aux adhérents du Vent des Etocs et réalisées par certains d’entre eux.

     Un autre projet occupait pourtant depuis des années l’esprit du skipper d’ENAWEN : la traversée du Golfe de Gascogne en ligne direct de Kérity vers l’Espagne.

     Le moment lui avait semblé venu de passer du rêve à la réalité.

     Mais un tel projet, avec la mauvaise réputation que le golfe a toujours eue, demandait réflexion et préparation.

     Huit mois de préparatifs seront donc nécessaires avant le départ prévu début août 2022 pour un projet proposé aux adhérents du Vent des Etocs début juin.

     La révision et la préparation d’ENAWEN avaient été anticipées l’hiver dernier (gréement dormant, passes-coques, pompes manuelles et de cales, etc…)

     Equipements de sécurité et de navigation complétés (radeau de survie révisé, balise de détresse PLB et EPIRB, téléphone satellite, émetteur AIS, VHF et pilotes automatiques de backup, GPS, logiciel de navigation et de routage, etc…)

     Enfin chargement et étude des fichiers GRIB de la météo dans le golfe sur 5 jours et simulations régulières du routage.

     Le matériel étant prêt, il fallait constituer le ou les équipages.

     Seul ENAWEN se sentit prêt à tenter l’aventure. Michel serait accompagné de 2 équipiers, Daniel Derchue et Alain Blondel, Jérôme se tenant en réserve pour faire le 4ème en cas de besoin à la dernière minute.

     Mercredi 17 août au matin, une fenêtre météo sur 5 jours est favorable, ENAWEN largue les amarres du quai de Kérity.

Michel Labidurie

L’Aventure commence … relatée ci-après dans le journal de bord de Daniel … puis dans le billet d’Alain.

Mercredi 17 Aout

     8h00 : sur le quai du port de Kérity, tout le monde est là, une vingtaine d’amis du Vent des Etocs sont au rendez-vous pour encourager l’équipage d’ENAWEN : Michel , Daniel et Alain. La musique en tête avec Thierry et sa flûte qui entonne l’hymne breton. Les amarres sont larguées à 8 heures précises sous les au revoir qui titillent les paupières et serrent un peu les gorges. Un petit tour d’honneur en plus d’ENAWEN pour saluer et remercier le groupe de nos chaleureux supporters, et c’est parti pour l’aventure. La grand voile est hissée dés le passage de la grande digue du port de Kérity sans grand vent. On sort du chenal de Penarguer toute voile dehors et on vire avec une petite brise vers  Basse Nevez en direction de … l’Espagne !

     A 10 heures, on s’enhardit, on envoie le spi seul et on avance à 6 nœuds.

     A 11heures, plus rien à l’horizon, même le grand phare d’Eckmühl a disparu. Le vent forcit en même temps qu’apparaissent les dauphins qui eux-aussi nous disent au revoir en venant taquiner à plusieurs reprises la proue d’ENAWEN. Il ne fait pas chaud sous ce ciel un peu gris, on s’habille plus chaudement pour mieux se protéger d’un vent plus fort approchant désormais les 15 nœuds. La mer forcit aussi avec une houle de plus en plus creuse. Avec  maintenant 20 nœuds, on a pris 2 ris dans la grand voile et réduit le génois. Avec 25 nœuds, on prend la précaution d’affaler la grand voile en même temps que le ciel s’assombrit avec l’arrivée concomitante de la nuit. La houle fait des creux de plus de 4 mètres et nous attaquent par  grand largue tribord. Très rapidement  et en pleine nuit noire, les rafales dépassent les 30 nœuds, la houle avec des creux de 5 à 6 mètres déferlent par leur crête en nous giflant à grands coups d’écume. la grand voile déjà affalée, le génois est réduit à un petit triangle de 2 ou 3 m2, et avec cette seule voile on maintient toujours une vitesse de 7 nœuds.

    C’est le moment des premiers quarts de nuit. Michel, le plus aguerri assure des quarts de 4 heures  tandis que le binôme Alain & Daniel voit leur quote-part réduite à 2 heures. Et ça ne va pas s’arranger avec la pluie qui commence à tomber et qui oblige à s’équiper des cirés. Il faut descendre dans le carré, retirer ce qui commence à être trempé, remplacer les chaussures par des bottes, se maintenir debout avec une patte en l’air et un bras pour éviter de tomber pendant qu’on enfile les combinaisons qui s’enfilent déjà difficilement quand on les essaye en magasin… et ce sera la grosse punition. Les estomacs du binôme ne vont pas résister au supplice du  carré qui dure d’interminables minutes. Le mal de mer vient de leur être inoculé, et sitôt sortis du cachot, les deux suppliciés vont  vider leurs « sacs »… et il y aura vomi en programme continu pour Alain et un sévère épisode pour Daniel. Le résultat sera le même, les deux vomisseurs vont rester deux zombies pendant 24 heures!

     Sur le plan des conséquences techniques des conditions de navigation pour le moins difficiles, on déplore l’arrachement d’une poulie du frein de bôme lors d’un empannage non contrôlé et la perte évitée de justesse  de 2 réserves de 20 litres de gasoil qui ont failli quitter la jupee arrière sur laquelle elles  avaient été installées et heureusement cadenassées. Remises ensuite en sécurité sur le passavant babord !

Jeudi 18 août

    La mer et le vent restent toujours forts après une nuit pour le moins chaotique. On a tous été bien secoués. Mais ce matin on note une amélioration avec une décroissance qui va se poursuivre tout au long de la journée. Les vomisseurs restent nauséeux, pas bons à grand-chose sinon à dormir sur le dos les mains croisées sur le ventre tels des gisants! ENAWEN s’est comporté comme un brave dans des conditions tempétueuses, et ça redonne confiance pour la suite qui ne va aller qu’en s’améliorant. Encore mieux que la veille, on va avaler 110 milles nautiques en 24 heures, soit presque 4,6 nœuds de moyenne … on va vite, tant mieux, on n’a pas souffert pour rien !

     La nuit de ce jeudi est beaucoup plus calme que la précédente. Le vent a tourné et nous sommes au près serré pas toujours facile à tenir pour suivre la route fixée. Un écart et ENAWEN est à contre, Daniel met le moteur pour une correction rapide de trajectoire, mais ce faisant, une coupure de la batterie de service a éteint le GPS ! Bravo l’artiste !

Vendredi 19 août

     Soleil et ciel bleu en ce début de journée. Le vent est tombé. Moteur donc et changement d’objectif vers Gijon puisque  les dernières heures de vent au près nous ont naturellement dirigés dans cette direction. Une ligne de traîne de pêche est lancée, on ne sait jamais si un thon de 40 kg se faisait prendre! L’état de santé du binôme s’améliore, tandis que celui du skipper est inoxydable, toujours bon pied, bon œil.

     Apparition au loin des premières cimes des montagnes espagnoles, et très loin également quelques geysers expulsés par les évents de probables baleines avec des petits bonjours furtifs de nageoires… enfin c’est ce qu’il nous semble avoir vu !

     Le vent reste absent et le moteur tout aussi indispensable. En cours d’après-midi une petite brise au près serré permet de coupler voiles et moteur. On avance alors à 5 nœuds constants jusqu’à notre arrivée sur Gijon. La fin du parcours par une nuit noire est une première pour le binôme, car le soleil s’est couché vers 22 heures et nous étions encore à 1h30 de notre point de chute. On ne distingue plus que les lumières artificielles de la côte et les outils électroniques de bord apportent une faible touche de clarté dans le cockpit. Les lampes frontales décorent plus nos têtes qu’elles ne permettent de voir ce qu’il pourrait y avoir autour du voilier, leurs faibles portées  ne nous aident pas beaucoup. Tout prend des formes fantomatiques. Les châteaux de 10 étages des gros cargos en attente font penser à des vaisseaux fantômes inhabités. Le relief de la côte qui se dresse devant nous n’est qu’une ombre de laquelle se détache des formes étranges, comme cette sorte de vaisseau spatial étrangement éclairé qui semble posé sur l’eau à l’entrée du port de plaisance. Ce n’est finalement qu’une petite péninsule  inoffensive qu’on découvrira le lendemain matin.

     Enfin l’arrivée au ponton vers 23h15 ! Elle est facilitée par un groupe de plaisanciers français déjà sur place. Félicitations de leur part pour l’« exploit » accompli et remerciements de notre part pour leur accueil et leur aide bienvenus !

     Le repas du soir est rapide, Michel accordant sa priorité à ENAWEN pour le récompenser de nous avoir amenés tous les 3 à bon port. Le champagne embarqué « au cas où » ne sera débouché que le lendemain, Neptune et ENAWEN étant bien sûr servis en premiers.

Samedi 20 août

     La nuit est réparatrice, sans bruit, sans gîte, sans tangage, sans être obligés de se cramponner aux équipets pour ne pas tomber des couchettes et sans se lever toutes les 2 heures pour les quarts de veille ! Réveil matinal vers 8h30, formalités à la capitainerie, passage aux douches (savoureuses autant que savonneuses après 3 jours et 3 nuits passés dans les mêmes fringues !)

    Balade dans les environs et une petite pause cocktail revigorante qui nous permet de réfléchir à la situation. Nous ne sommes pas à l’escale initialement prévue plus à l’ouest (Ribadero) puisque nous nous sommes laissés diriger par le vent sur Gijon. Et bien restons-y ! La ville parait sympathique et animée, on décide d’y rester pour les 3 nuits suivantes et on verra comment rayonner à partir de là.

     L’après midi est consacrée pour Michel à récupérer les data de la trace « historique » Kérity – Gijon. Alain, dont la mission de 3ème homme pour ce voyage aller est terminée, cherche un blablabus pour remonter dés dimanche en France. Daniel consigne ses notes qui lui serviront pour rédiger le compte rendu de la Trans Gascogne.

     La journée s’achève par une soirée tapas dans les bistrots de la vieille ville juste devant le port de plaisance. Difficile de trouver une place. Alain se débrouille comme un chef et on va pouvoir déguster quelques tapas : patates au chorizo, jambon ibérique, et surtout une présentation aussi belle que succulente : poivron rouge+fromage brebis+anchois ! On est en pleine fête du cidre (pas bon) mais le marketing s’est chargé d’en améliorer au moins l’image par un code de consommation bien particulier. Avec un bouchon en T au goulot, le cidre est versé de très haut (comme les berbères pour le thé) et en petite quantité  dans un verre. Objectif l’aérer et le boire vite en « one shot »… c’est rigolo, ça participe à l’ambiance et même s’il est toujours mauvais, les asturiens en boivent des quantités industrielles !

     Retour au bateau et un bon nettoyage de la tuyauterie avec un rhum arrangé embarqué permet d’aller se coucher vers minuit.

Dimanche 21 août

     Lever très matinal à 5h00 pour Alain qui prend son blablabus à la gare routière de Gijon. Merci Alain et bon voyage !

     Lever beaucoup moins matinal à 9h30 pour les 2 autres trainards. Daniel sur la chemin de la douche à la capitainerie découvre un autre visage de l’avenue dans laquelle la fête du cidre battait son plein la veille, pleine de monde et de bruit. Là tout est vide et seules les balayeuses font le ménage.

     De retour à bord, c’est le débrief autour de la question : qu’est ce qu’on fait ? on trouve facilement la réponse. On va louer une voiture pour le lendemain  pour aller vers l’ouest visiter les ports qu’on a perdus en allant directement sur Gijon. Et dans la foulée on descendra sur St Jacques de Compostelle.

    En attendant on va explorer une partie de Gijon en allant du coté  petite plage  Bahia de Poniente et du coté grande plage Mar Cantabrico. C’est en revenant de la grande plage et en passant par la péninsule Cimavilla et la vieille ville, qu’on assiste à une série de petites régates, en profitant d’une superbe vue sur cette magnifique baie.

     Au retour le soir au port, on a la bonne surprise d’être invités par nos amis expatriés français à un BBQ ponton ! Des français de La Rochelle, d’Arzal, d’Audierne et quelques étrangers tous plus sympas les uns que les autres, bon mangeurs et bons buveurs (anglais, suédois, irlandais, russe). Heureusement pas trop de chemin à parcourir pour tout ce beau monde pour aller se coucher. On ne déplorera aucun noyé, ni disparu !

Lundi 22 août

     Un lever matinal à 7h pour se rendre à  9h à l’ouverture de l’agence de location de voiture. Désillusion, pas de voiture disponible aujourd’hui. Remis à demain. Mais tout le dossier de réservation est réalisé rapidement grâce à une jeune femme parfaitement bilingue rencontrée dans cette agence. Elle est belge et décidée à vivre en Espagne en ouvrant un gîte. Non contente de nous aider à dialoguer, elle nous donne aussi l’adresse d’un excellent restaurant Tierra Astur. Le niveau de qualité qui nous sera servi pour déjeuner n’a d’égal que le nombre de spécialités proposées dans un menu de plus de 50 pages !

     Reste à passer l’après midi. A une trentaine de km se trouve un petit abri côtier qui nous avait été suggéré : Ria de Villaviciosa. Suivant la démarche d’Alain, nous avons aussi utilisé les bus de la gare routière. A 16h, Daniel qui n’avait pas de masque anti covid a failli  louper l’heure du départ du bus, obligé d’aller courir dans une pharmacie pour en trouver un !

     Finalement on aurait mieux fait de le louper car le bus nous a déposés dans la petite ville à 8 km de route pour rejoindre la côte. Il a fallu trouver un taxi et lui demander de revenir nous chercher. Un immeuble d’une autre époque, quelques vieux sur des transats et des plus jeunes pataugeant dans une plage vaseuse, ne nous ont pas donné l’envie d’y revenir ! On s’est aperçu plus tard, que faute d’avoir compris le chauffeur, on aurait dû aller sur l’autre berge !

     De retour à 19h, un des français de la fête de la veille nous a repérés d’un poste stratégique qu’il avait au bar et invités à partager un moment de discussion… qui s’est prolongé jusqu’à 22h après moult bières et cidres. Vite au lit !

Mardi 23 août

     Plus de chance aujourd’hui avec une jolie SEAT Ibiza pour notre périple routier. Comme pour le périple marin c’est Michel qui tient la barre (à roue et en l’occurrence c’est plus pratique qu’une barre franche dans une voiture !). On avait demandé à la capitainerie une nuitée supplémentaire pour avoir 2 jours devant nous .

    Saint Jacques de Compostelle est notre première destination. On profite d’un réseau autoroutier espagnol de belle qualité sur 300 km. La végétation de la région est très verte et très boisée avec une forte présence d’eucalyptus. On arrive à Santiago de Compostelle à 13h. On a la chance de se garer à 200m de ce sanctuaire qui débouche au détour d’une montée de quelques marches sur une esplanade pavée rectangulaire, bordée de chaque côté de bâtiments majestueux dont le plus impressionnant en taille et en sculptures est sans conteste la cathédrale. La foule fervente des pèlerins est contemplative et la dévotion est palpable. Et encore plus lors du coucher du soleil dont les rayons rasants donnent à la pierre une couleur d’or. C’est à la fois calme et pénétrant.

     Un bel hôtel de luxe (Le Peregrino) réservé en périphérie de la zone touristique nous assure un excellent repos.

Mercredi 24 août

Réveil à 7h et reprise de la route pour 5 destinations :

     70km pour aller jusqu’à la Corogne, étape importante pour de nombreuses régates et courses autour du monde. Mais le Porto Deportivo destiné à la plaisance est très décevant. Le cadre est industriel et les environs des quais sont très pauvres en café et restaurants. On n’y reste pas longtemps d’autant que la météo est maussade. On apprendra plus tard que le port intéressant est en centre ville… tant pis ce sera pour la prochaine fois !

     50 km pour aller à Ribadeo. Le port n’est pas très attractif, il est surtout réservé pour les pêcheurs avec leurs petits bateaux à voile aurique. Très peu de voiliers de plaisance. On y reste peu de temps car plutôt attirés par un joli village situé sur l’autre rive Castropol. Y aller nous oblige à prendre le grand pont qui surplombe l’estuaire de la Ria. (pont apparemment renforcé sous son tablier par un impressionnant assemblage de poutrelles métalliques). Village sympathique mais seulement 3 restaurants en contrebas, soit complets à 13h30 , soit très chers. Tant pis, on ne mange pas !

     50 km pour aller jusqu’à Cudillero. Superbe endroit mais difficile d’y entrer en voiture. Un grand parking  éloigné favorise une petite marche à pied pour aller faire les touristes. De jolies maisons colorées et des petits appartements sont agglutinés en terrasse entre 2 collines. Dans le petit port, les emplacements pour la plaisance sont peu commodes. Pas de regret d’y être passés en voiture !

     50km pour revenir sur Gijon , faire le plein de carburant pour rendre notre voiture au loueur et retrouver ENAWEN, toujours à sa place au ponton !

     Ici s’achève notre escapade routière, on reprend dés demain la découverte de la côte espagnole par la voie maritime.

Jeudi 25 août

      A 10h on quitte le port de Gijon sous une grosse bruine, direction Lastres. On débute ainsi un retour progressif ver l’est. La houle est notre premier partenaire un peu turbulent, ça brasse un peu, on est au près bon plein avec un vent de 15 nœuds. Pour plus de confort on prendra temporairement 2 ris dans la grand voile. Installés dans le cockpit, on est bien. On finira au moteur avec un vent mollissant progressivement.

    Le petit port de Lastres est au pied d’une petite montagne où le village s’accroche et se gravit par des petites ruelles pentues. ENAWEN rentre sans difficultés dans le port  vers 14h30 et s’amarre sur un petit ponton avec accès sécurisé. Petit problème : pas de contact avec la capitainerie, on ne dispose donc ni de clé de ponton, ni de clé de douche. Heureusement, ayant aidé un hispano-belge à amarrer, celui ci nous confie sa clé pour les sanitaires. Pour la porte d’accès au ponton, ce sera par escalade !

     Une petite visite de la ville nous permet de repérer une épicerie qui ouvre à 17h00. Le temps de prendre un apéro en terrasse qui donne sur le port, on achètera pain et biscottes à cette petite épicerie. Repas du soir sur ENAWEN. 

Vendredi 26 août et Samedi 27 août

     Avant de partir de Lastres, le capitaine vient quand même nous réclamer le montant de notre escale au ponton (on n’a profité d’aucun service, mais c’est comme ça !)

     On quitte Lastres à 9h  pour rejoindre Llanes. Petite houle au départ grossissante jusqu’à la fin. Grande constance côté vent : nul ! Ce sera moteur de bout en bout. Daniel est à la veille pendant toute l’étape tandis que Michel s’accorde un peu de repos de récupération.

     L’entrée est délicate dans cette petite marina tout en longueur fermée parfois par des portes d’écluse en cas de vent fort provenant du Nord. Aucune réponse à nos appels à la capitainerie pour savoir où s’amarrer. On s’enfonce dans le chenal qui lui-même s’enfonce dans la ville très touristique. Au bout du chenal une passerelle empêche toute progression vers l’amont. Il est temps de faire demi-tour, mais c’est étroit et ENAWEN va laisser un peu de sa peinture de poupe sur le ponton carburant puis gratouiller un peu le quai avec son balcon avant.

      Retour vers l’aval et finalement c’est au tout début du chenal que se présente la bonne opportunité. Amarrage parfait. Le capitaine du port est finalement responsable du point carburant et nous hèle de l’autre rive  pour que nous nous acquittions de la redevance portuaire de 20€… mais sans accès aux sanitaires puisqu’ils n’existent pas !

     Pour autant, Llanes nous plait au premier coup d’œil. On va y faire relâche. Pour l’instant c’est tapas et vin rosé puis une grosse sieste jusqu’à  20h … avant de penser à se recoucher pour une nuit tout entière !

     Relâche, donc lever tardif ! Petite visite touristique de cette ville qui est une des étapes du chemin de Compostelle. Et fait assez unique sa basilique appartient aux habitants qui ont  permis, dans le passé, de restaurer et sauver l’édifice par une souscription. La journée s’étire entre balade, flânerie, achat de cadeaux souvenirs, examen des prochaines étapes et surtout un bon moment de gastronomie roborative. 2 Mojitos servis au Nautilus / la Marina par un garçon de café hyper sympa, Alfonso de son prénom, parlant espagnol, anglais et français, et qui nous a pris sous sa coupe pour nous servir comme des rois : bonite d’1kg chacun, vin blanc, riz au lait, liqueur digestive… et on est reparti avec un doggy bag sous le bras !

Dimanche 28 août

     Petite étape au programme de ce jour pour rejoindre le port de San Vicente de Barquera. Départ à 10h sous le soleil et traversée tout au moteur par l’absence totale de vent  pour une arrivée en début d’après-midi. Une allure qui permet néanmoins à Michel de pêcher son premier maquereau. Au port, on sait à l’avance que les places sont chères puisque seulement 3 places sont réservées à la plaisance. Un voilier nous devance de peu et nous nous plaçons à son tribord, mais nous constatons que nous bloquons l’accès au ponton carburant ! Une nouvelle manœuvre un peu cafouilleuse nous oblige à changer de place le long d’un pylône coulissant … de nouvelles petites touchettes sur les flancs d’ENAWEN lui apportent de  nouvelles cicatrices !

     On tape dans notre doggy bag pour le déjeuner, la bonite est aussi savoureuse froide que chaude, et une bonne sieste fera office de dessert.

     Suit une visite de la ville sans grand intérêt, comme souvent beaucoup de boutiques de vêtements et autant de restaurants, mais on n’a plus faim ! Le hasard nous pousse vers le château médiéval de la ville et c’est le jour de la fête annuelle de ce lieu : le chemin piétonnier d’accès est encombré de camelots et de petites animations moyenâgeuses. L’orage gronde, il nous laisse juste le temps de redescendre vers le bateau avant la grosse « groulée » ! Le hublot de la cabine du capitaine est resté ouvert, Michel dormira dans le mouillé !

     Le repas du soir est frugal : 1 Ricard et 1 yaourt ! On discute la suite de notre expédition et on décide la destination des 2 dernières étapes. Ce sera Suances et Laredo .

Lundi 29 août

     La capitainerie désormais ouverte  nous ponctionne notre redevance de nuitée (sans sanitaires, une spécialité espagnole qui ne nous étonne plus), mais nous permet surtout de faire un complément de gasoil. On quitte donc San Vicente de la Barquera à 10h30 pour arriver à Suances  à 14h45 après avoir parcouru 18 milles nautiques. 1 heure au moteur au début et 1 heure à la fin, mais au milieu une belle allure au portant avec voiles en ciseau et de jolies pointes à 6 nœuds.

     Le port de Suances est dans une petite ria, mais ce n’est qu’une grosse baignoire avec quelques dizaines de bateaux à moteur, et il est plein à craquer. Aucun contact avec la capitainerie, comme d’habitude, donc on farfouille à l’extérieur où les 3 seuls embossages sont déjà pris. On jette notre dévolue sur une grosse bouée jaune équipée d’une énorme amarre… on ne risque pas de se décrocher. On boulotte notre petite dinette à bord … et on sieste !

     Daniel profite de notre situation isolée pour prendre une douche « naturiste » dans la jupe arrière d’ENAWEN. Ça fait du bien de se laver de temps en temps. Repos, détente, farniente… il fait beau, c’est calme. Mais ça ne va pas durer. Un énorme coup de corne de brume déchire le silence en même temps que nos oreilles. L’origine du bruit et des engueulades qui pleuvent en Espagnol viennent de l’entrée dans la ria d’un bateau dragueur qui rentre de sa journée de curage du chenal.

   On fait fissa pour larguer la grosse amarre et la grosse bouée, évidemment à l’échelle de la taille du dragueur. Et on finira par se reprendre sur une plus petite bouée en espérant que personne ne nous dégagera dans la nuit qui vient ! 

Mardi 30 août

     Nuit tranquille sans être jamais dérangé. Parfait ! On lâche notre 2ème bouée avec gratitude à 9h. On fait un petit coucou au dragueur qui a déjà repris le boulot de désensablage du chenal. Et c’est parti pour plus de 7 heures de … moteur. Pas un pet de vent !

     L’arrivée à Laredo nous apporte toute satisfaction. C’est un grand port moderne d’une dizaine d’années de plus de 850 places, mais délaissé au début par l’absence de sanitaires ! Comme c’est bizarre ! Mais aujourd’hui les installations sont dignes des plus grandes marinas avec une ambiance yacht-club de haut niveau. La capitainerie nous parle en français et on dispose des codes d’accès au ponton et aux sanitaires. Ha! Le retour au confort moderne !

     On y retrouve notre voisin de ponton de San Vicente de la Barquera qui connait bien Laredo. Il nous accompagne  pour le dîner pris dans un chouette resto Tapas où on déguste  le poulpe a la gallega. Une rondelle de poulpe tendre sur une rondelle de pomme de terre, hum c’est bon !

     Retour au bateau pour analyse des fichiers météo Gribs et savoir ce que la mer et la météo nous réservent  pour les 2 prochains jours nécessaires à notre remontée sur Royan. C’est tout bon, c’est décidé, on part demain, on quitte l’Espagne !

Mercredi 31 août et Jeudi 1 Septembre

     On quitte Laredo à 8h avec 170 milles nautiques à courir devant nous pour rallier Royan.

     Par faute de vent, c’est le moteur qui nous propulse pendant 1 heure. Un vent léger nous fait penser à lancer le spi. Daniel n’y tient pas trop car devant nous les nuages grossissent… et bien nous en pris car le passage au travers de 2 gros grains nous force à prendre 1 ris dans la grand voile et 3 ris dans le génois avant de revenir à des conditions plus confortables et à libérer les ris vers 13h. On fait du près serré mais on a du mal à tenir le cap de 30°.

Les menus sur ENAWEN sont à la bonne franquette : maquereau /ravioli, thon/ pomme de terre…

    La répartition des quarts de 3 heures se partagent équitablement entre Michel. 21h-24h , Daniel 24h00-3h00, Michel 3h00-6h00, Daniel 6h00-9h00. La première tranche sera la plus agréable tout à la voile, la seconde tranche fera appel encore une fois au moteur en appui. Les périodes de quart passent vite, on enregistre les données techniques à chaque heure, on a du temps pour penser, on a du temps pour contempler, on observe le ciel, la mer, les étoiles … A l’image des étoiles filantes qui voient leur trace s’évaporer en une fraction de seconde, ENAWEN laisse derrière sa poupe des écumes filantes, elles-aussi, jolies traces blanches qui se dispersent dans l’immensité noire de la mer qui nous entoure.

     Le système AIS  émet ses bip-bip d’alarme à chaque détection d’un navire en zone proche, on essaie de les repérer de visu par leurs feux de navigation, on veille aux risques de collision, on prête une attention permanente à cet environnement nocturne.

    Le jour se lève et les couleurs du soleil levant font écho à celles du soleil couchant. Tableaux sans cesse retouchés et qu’on a loisir de voir évoluer seconde par seconde. Beaux souvenirs captés en photo comme en sa propre mémoire.

    Il faut penser aussi à notre arrivée sur Royan et son port qui, comme par hasard est au moment où nous arrivons une des étapes de la Solitaire du Figaro avec 40 voiliers ! Les places vont donc être chères. En effet le port est même fermé à l’accueil des bateaux de passage pendant la durée de l’étape. Cela inquiète un peu Michel, mais pertube beaucoup Daniel.

     Le vent est inconstant en ce jeudi et les voiles sont souvent assistées par des appuis moteur qui permettent entre autres de corriger le cap. A partir de 19h00 c’est uniquement à la voile que s’achève notre traversée. Au passage et à l’approche de l’estuaire on aura droit à de nombreuses chasses de bancs de thons qui sont autant de flèches d’argent qui  bondissent hors de l’eau. Trop loin de nous pour prendre des photos, mais Dieu que c’est beau ! Les dauphins nous accompagnent  aussi, en longeant l’étrave et en nous observant parfois d’un coup d’œil.

     La traversée de la Gironde parait interminable et la navigation de nuit n’y est pas facile. Les amers lumineux des balises se confondent avec l’éclairage exubérant de la côte Royannaise. Le plus distinguable restant la cathédrale N.D. de Royan dans sa robe de lumière violette.

     Les balises d’approche rouge ou verte ne bénéficient malheureusement pas toutes d’éclairage. D’ailleurs  une balise tourelle rouge nous fera une grande frayeur, si proche de la ligne d’autoguidage de notre GPS, que seul un écart de dernière seconde nous a permis d’éviter !

Des places sont disponibles au ponton d’accueil et à 22h nous y prendrons place avec soulagement.

Ça y est , on est de retour en France !

Vendredi 2 septembre – Dimanche 4 septembre

Relâche pour 3 jours à Royan

     Cette étape nous permet de souffler un peu et c’est aussi l’occasion de renouer contact avec des amis ou la famille locale. C’est aussi la possibilité de préparer son estomac au retour à la cuisine française et les meilleurs endroits pour cela étant les restaurants, on va y faire quelques stages !

     Michel retrouve ses amis de longue date de Limoges et son frère. Daniel retrouve sa fille et son compagnon en vacances à St Palais sur mer .
     Liste des  lieux de restauration écumés : l’appartement de vacances des amis de Michel , le Régent et L’ Inattendu à Royan, la Crique à Suzac-Meschers

     Activités :  shopping, balade à St Palais et la Grande Côte, départ de la Solitaire du Figaro aux premières loges pour la sortie du port  un par un des concurrents.

Lundi 5 septembre

     On reprend du service, finies les vacances, la remontée vers la Bretagne commence ici. Et on repart avec Anne–Marie, passagère presque clandestine, déjà embarquée dans de précédentes sorties avec Michel sur ENAWEN. C’est donc avec 3 personnes à bord qu’on quitte le port de Royan à 8h. Destination Saint Denis d’Oléron, au nord de l’ïle.

    Quasiment sans vent, le moteur est nécessaire pour sortir de l’estuaire de la Gironde pour passer le phare de Cordouan planté au milieu d’une longue langue de sable bornée par des brisants au beau milieu de la Gironde. On longe ensuite successivement Pontaillac, Vaux- Nauzan,  St Palais sur Mer, la Grande Côte pour aller jusqu’au phare de la Coubre. A cet endroit les nombreux brisants impressionnent (surtout quand on les traverse !) par la hauteur prise par certaines déferlantes. Il fait beau, le spectacle est de haut niveau. On poursuit toujours au moteur le contournement par l’ouest de l’île et on vire au phare de Chassiron qui dévoile une nouvelle zone importante de brisants. Cette fois les balises cardinales (en particulier celle d’Antioche) sont bien respectées pour en rester bien éloignés d’autant que le vent se lève et qu’il secoue ENAWEN et ses passagers.

     La dernière difficulté relève de la présence d’un seuil qui nous empêchera bientôt de rentrer dans le port si on ne prend pas garde à l’heure limite de marée basse. Le soleil nous gêne un peu pour bien repérer l’entrée du chenal et c’est même un peu avant le seuil que la dérive va faire quelques touchettes… ça n’arrêtera pas ENAWEN et on s’installe finalement sur un catway dans le port de St Denis.

     Michel aura une nouvelle fois lancé sa mitraillette à maquereaux, pour en attraper 3 qui feront, avec des patates,  le délice du dîner de nous trois.

Mardi 6 septembre

      Tout le monde a bien dormi. Daniel, matinal, est allé jusqu’au village pour chercher pain et viennoiseries pour nous 3 et aussi pour 3 amis d’Anne-Marie séjournant sur Oléron. On retrouvera tout ce beau monde autour d’un café plus tard en matinée et ce n’est que vers 12h qu’on appareille pour La Rochelle.

     Comme souvent pas de vent au début. Puis voile avec assistance moteur et enfin un vent suffisant pour voguer gentiment jusqu’à 5-6 nœuds. Plus tard à l’approche du port de la Rochelle un  gros nuage (mal évalué)  génère une rafale à plus de 30 nœuds qui bloque le pilote automatique en butée, alors à la rencontre d’un catamaran avec un risque collision. Michel rattrape un départ au lof prends 2 ris dans la grand voile et enroule complètement le génois pour calmer tout ça !

     Le nuage passé, le vent retombe tout de suite et c’est avec assistance moteur et grand voile qu’on arrive  à l’entrée du chenal qui conduit à droite au port des Minimes et tout droit au vieux port historique avec ses célèbres tours.

Amarres au catway à 14h30, soit 2h30 pour 11 milles nautiques parcourus.

     L’après midi sera consacré à une balade dans la vieille ville en compagnie de Gérard venue récupéré Anne-Marie. On se fera un plaisir gourmand avec de bonnes crêpes. Puis une fois redevenu binôme, Michel et Daniel vont prendre la petite navette de mer électrique qui assure la liaison Vieux Port / Port des Minimes pour retourner sur ENAWEN.

Mercredi  7 septembre

     Bonne nuit mais un réveil sous la douche avec une grosse pluie d’orage. Et une équipe du port qui installe étonnamment des pontons temporaires en travers des pontons habituels pour créer des carrés fermés… et nous sommes dans le carré, pour ainsi dire prisonnier. Renseignement pris, il s’agit d’une répétition en perspective du Grand Pavois prévu fin Septembre, et les pontons sont retirés pour nous laisser partir vers 10h30 pour rallier Saint Martin de Ré.

     Le vent est soutenu, on part tel qu’on est rentré avec 2 ris dans la Grand Voile et un génois rétréci et on va déjà bon train à 5 nœuds. On passe la Palice et en dessous du pont de l’ïle de Ré. Et instinctivement, on lève toujours la tête comme si on risquait de toucher le tablier avec la pointe du mât !

     Le vent fait du travers ou du portant, mais il nous fait bien avancer et arriver à 13h au ponton du môle tout près de l’entrée habituellement protégée par un vieux brise–lame dont on comprend tout de suite que ses heures sont comptées. Rouillé, à demi délabré il fait parti d’un gros chantier de réaménagement de l’entrée du port de St Martin. Les pelleteuses et une plate forme de curage sont à l’œuvre .

     La capitainerie nous propose une place derrière l’écluse mais elle nous enferme jusqu’au lendemain après midi ce qui contrarie nos projets. On préfère rester au ponton d’attente derrière le Grand Môle, une place qu’on avait appréciée lors de nos précédentes escales. Autre punition, du fait du chantier l’alimentation des bornes électriques est coupée, donc pas  de confort de ce coté là.

Un bon repas au Belem : friture d’éperlans, merlu et patates rétaises, crème brulée, café…l’addition, merci !

     Surprise au retour à 22h, ENAWEN est posé sur ce qui était auparavant une souille permettant le stationnement des bateaux avec 2 mètres de profondeur et remplie de vase molle. Mais maintenant apparemment comblée (conséquence des travaux ?). Pas de problème, ENAWEN reste toujours debout, comme les chevaux la nuit !

Jeudi 8 septembre et Vendredi 9 septembre

     Une question turlupine Daniel qui se réveille à 2h00 du matin au sujet de l’heure de départ de jeudi fixée à 10h. Avec l’échouage observé hier soir à 22h, on sera à nouveau échoué aujourd’hui à 10h ! Pas pratique pour partir de bonne heure. Au petit matin et avant l’heure prévue du lever, on analyse la situation, il faut partir et vite ! Alors qu’ENAWEN flotte encore on le recule à la main en espérant trouver un peu plus de fond, mais sans succès. Alors hop, on se casse !

     Départ à 9h45 pour  Les Sables d’Olonne avec 27 milles nautiques à parcourir.

     Le vent est soutenu et la mer agitée. L’allure au près serré, on avance entre 4 et 5 nœuds pendant plus de 2 heures. Ensuite pour garder la cap on fera appel à l’appui moteur .

    Des creux de 3 à 4 mètres avec un vent qui oscille entre 20 et 25 nœuds et quelques grosses vagues écumantes viennent frapper ENAWEN. Par contre les nuages et les rayons du soleil s’amusent à changer les couleurs des vagues, on obtient des contrastes parfois trompeurs. Dans une mer vert bouteille ou vert encore plus sombre apparait soudain une zone circonscrite par un rayon de soleil qui prend des couleurs turquoises, pour peu que cette zone écume un peu, on pourrait croire en la présence d’un haut fond. C’est beau mais c’est à saisir vite, tout est éphémère sur la mer.

     L’arrivée est quand même musclée, le vent est de plus en plus fort.  Le génois est roulé mais il faut maintenant affaler la grand voile et la mer nous bouscule en tout sens . Ce n’est que dans l’entrée du grand chenal qu’on commence à se sentir un peu protégé et qu’on peut se mettre face au vent pour affaler. La capitainerie nous accorde facilement une place comme d’habitude au port Garnier.

     Une mauvaise surprise en rentrant dans le bateau, le hublot de la cabine avant a été mal refermé lors de la sortie et rentrée immédiate du câble électrique à St Martin ! Résultat : matelas, oreiller, duvet, prises électriques … tout est trempé !

     Une sieste de 18 à 21h est la preuve d’une certaine fatigue à ce stade de la croisière… on ne fera pas grand-chose sinon de décider de faire demain relâche ici, puis de se recoucher pour une nuit complète !

     Le vendredi se déroule sur un rythme plus calme et pourtant actif : il faut alternativement sortir et rentrer tous les éléments trempés pour les faire sécher, mais ce vendredi est une journée à averses ! On en profite quand même pour procéder aussi à différentes opérations. Daniel monte dans le mât pour éviter que la drisse de grand Voile ne se bloque systématiquement dans les fixations des lazy jacks. Michel part en vélo sur port Olonna pour acheter prise allume cigare et prises multiples. On imperméabilise la capote qui laisse passer l’eau… et surtout on reçoit la visite d’Alain, qui « en voisin » nous fait l’amitié de nous retrouver depuis son départ de Gijon en blablabus  (qui ne s’est pas déroulé sans mal non plus). Un repas sera pris ensemble avec Pasta et Ti-Punch et évocation des souvenirs de notre première traversée du Golfe de Gascogne. Un bien bon et beau moment .

Samedi 10 septembre

Le sable dans les yeux c’est désagréable.  Mais Yeu après les Sables, quand on est en croisière c’est bien agréable !

     Et effectivement Port Joinville et son île ont un charme qui nous amène assez souvent à y faire escale. En quittant les Sables d’Olonne vers 9 H00, on met 6h30 pour parcourir les 29 milles nautiques de distance. On bénéficie d’un vent permanent entre 7 et 8 nœuds au près serré et au près bon plein en arrivant. La mer est encore un peu houleuse au départ puis confortable. Le ciel est gris. Rien de particulier non plus sur l’île, sauf une nouvelle spécialité culinaire. On connaissait les « patagos » encore appelée Vénus de l’Île d’Yeu, sorte de tellines cuisinées en marinière et accompagnées de frites. Est apparue maintenant sur l’île, une spécialité vendéenne, sorte de flan, dont la boulangerie fait la promotion en devanture de sa boutique : le « Fion ». Pas de chance, il n’y en avait plus… on l’a eu dans le…

     Grosse sieste (encore) et dîner avec plancha Tarama et plancha fromages arrosées d’un vin du sud ouest baptisé les  « frontons » flingueurs ! Décidément cette étape est riche en jeux de mots dont l’élégance n’aura échappée à personne !

Dimanche 11 septembre

     On quitte une île pour une autre, après Yeu c’est Noirmoutier et son port également souvent visité l’Herbaudière. 21 milles nautiques en 4h50.

     Départ à 10h avec un bon vent travers de 8 à 10 nœuds permettant une vitesse bateau de 5 à 6 nœuds les 3  premières heures, puis comme d’habitude, une baisse de régime qu’il faut compenser par un appui moteur. On commence à apercevoir le parc éolien de St Nazaire.

     D’habitude amarré au bout des pontons, on est allé cette fois au fond du premier ponton L. Capitainerie, sanitaires et plateforme portuaire, bien sans grand changement.

     Et pour fêter notre retour sur ce port on s’offre un joyeux  cocktail à base de sirop de cerise, de Gin et de thé vert, qui nous ravi le palais !

Lundi 12 septembre

     Cette fois on retourne sur le continent, et Le Croisic avait été retenu. Mais considérant la longueur du chenal à parcourir pour arriver à une zone d’échouage on préfère opter pour Pornichet.

     Avant le départ on refait le plein de gasoil du réservoir principal en utilisant comme toujours une pompe siphon pour aspirer le gasoil d’un bidon. Problème : le tube plongeur s’est déboité et est resté coincé en diagonale dans le bidon! Il faut alors utiliser un bambou et un crochet de sandow pour arriver au bout d’un bon quart d’heure à le récupérer ! C’est la rubrique « trucs et astuces »

     Départ à 10h pour parcourir les 15 milles nautiques jusqu’à Pornichet. Une belle navigation avec 1 ris dans la Grand Voile et 2 ris dans le génois  pour un vent travers d’environ 15 nœuds et cap direct sur l’objectif. Joli port bien aménagé, gagné sur la mer devant l’ancien petit port à échouage. L’esplanade portuaire est bien équipé avec commodités, accastilleurs et restaurants.

     Un petit tour en ville nous déçoit complétement. On peut aimer ou ne pas aimer la Baule et sa baie barrée d’immeubles mais au moins le devant de la mer est animé. A Pornichet, rien, tout le front de mer n’est que résidentiel, pas de magasin, pas de bistrots… tout cela est derrière le premier rang de béton. Tristounet.   

     Heureusement le spectacle est en mer durant le parcours. On voit l’amplitude du parc éolien de Saint Nazaire issu de l’installation d’une  première éolienne flottante au large du Croisic en 2018. Le parc compte aujourd’hui  80 éoliennes implantées sur le récif capables de fournir 20% des besoins de la Loire atlantiques fin 2022.

     On observe aussi d’assez loin le Phare du plateau du Four du Croisic. Un phare avec un motif à spirale gris et blanc. L’épave de L’Hermione, bateau de Lafayette,  repose non loin de cet endroit.

Mardi 13 septembre 

     Tout comme Pornichet, le choix du Port de Piriac comme prochaine étape est une première. Piriac ne nous est pas totalement inconnu, car un youtuber Yannick B. , propriétaire d’un First 25.7 S , possède un emplacement dans ce port de Piriac. Il en parle dans ses vidéos avec enthousiasme d’où l’idée d’y aller nous aussi.

     Malgré quelques forts coups de vent annoncés (4 rafales à 6) nous partons à 11h00 de Pornichet pour rallier Piriac distant de 19 milles nautiques. Nous avons du bon vent tout au long de l’étape, le plus souvent au portant avec voiles en ciseaux et une vitesse établie entre 4 et 5 nœuds. Presque trop vite car nous arrivons à 14h30  trop tôt par rapport à la hauteur du seuil et l’heure d’ouverture des portes. Et bien on fait des ronds dans l’eau jusqu’à 15h30 . On s’amarre au ponton qui nous est alloué à la place D7 à 16h. Comme toujours rangement d’ENAWEN ou apéro sardines d’abord, alors, résultat la capitainerie est fermée et pas de code pour les commodités. Heureusement l’entraide aux pontons facilite des échanges.

     Durant la traversée, Michel a pêché un tout petit maquereau aussitôt relâché. Il faudra donc manger autre chose et c’est au travers d’une balade dans le village qu’on comprend l’enthousiasme de notre youtuber pour Piriac. Très joli parcours piétonnier, sans bruit, sauf celui des petits oiseaux et des gens qui flânent entre les nombreuses petites boutiques et restaurants. Le restaurant « Chez Grand-mère » nous proposera un émietté de crabe au guacamole et au pamplemousse et un énorme granité de framboise que même Daniel a du mal à finir.

Mercredi 14 septembre

     Cap sur Port Haliguen / presqu’île de Quiberon : on largue les amarres à 9h15 de Piriac, après avoir réglé notre nuitée à la capitainerie et en ayant à courir 25 milles nautiques. On passe dans la brume au large de l’île du Met .

     On démarre avec une allure au près jusqu’à 13h avec une vitesse de 4,5 nœuds qui va bien. Le vent mollissant, Michel en profite pour pêcher 3 maquereaux. Puis le moteur prend le relais avec un virement de bord à hauteur de St Jacques/Sarzeau. A 14h00, grande première on mange un repas chaud en pleine navigation. Puis on arrive à 16h00 à Port Haliguen, totalement rénové. Installations magnifiques et capacités d’accueil augmentées. Guidé par un placier, ENAWEN va devoir rentrer son ventre pour se coincer entre un bateau hors bord et le catway !

     Michel se charge du nettoyage de ses maquereaux et Daniel prend des photos du 3 mâts-école Norvégien, le Gorge Stage III, qui a jeté l’ancre et qui mouille devant le port. On verra le lendemain matin  l’équipage des élèves officiers  souquer  ferme sur les avirons des barques de ré-embarquement.

Le dîner de ce  soir ? Les maquereaux évidemment !

Jeudi 15 septembre

Une dernière île avant de rentrer ? Ce sera Groix avec pour escale Port Tudy. 

     On quitte Port Haliguen à 9h avec un vent nul mais qui se lève assez rapidement pour nous donner l’espoir d’une journée à la voile. C’est bon jusqu’à 13h. On laissera la Teignouse sur bâbord en empruntant un raccourci plus près des côtes mais prudemment. La direction du vent n’est pas favorable (vent debout) et on s’éloigne à 65° du cap. Le moteur va alors prendre le relais pour nous amener à Port-Tudy à 16 h. Soit 7 heures de navigation pour 28 milles nautiques.

     Les « contacts » de ponton reprennent leurs droits : après une blanche pression prise « aux Garçons du Port », on aura droit à la bière offerte par nos voisins allemands sur tribord, puis un apéro whisky avec nos voisins (de Loctudy) sur bâbord.

     Pour éponger tout ça, on va  se manger un « macropate » (maquereau + pâtes)  préparé par Michel .

Vendredi 16  septembre

     Brigneau, escale initialement prévue pour ce vendredi , est rejetée pour des problèmes de marée (hauteur d’eau insuffisante et mouillage dans la vase : non merci !)

On se rabat sur une destination moins contraignante Doëlan

     Avant de quitter Port Tudy, une discussion s’engage entre Michel et un couple propriétaire d’un Feeling 306 (basé à Port La Forêt), qu’on nous invite à visiter. Une merveille , bois clair, hublots plus nombreux, espace de circulation et sanitaires relookés… ça rafraîchit sérieusement l’image du Kelt 29 (ENAWEN) !

    On part vers 11h et on va avoir enfin une pleine journée de voile tout au près serré. Un  vent constant de 12 à 15 nœuds, 1 ris dans la grand voile et 2 ris dans le génois et 1 virement de bord au droit de Doëlan pour rattraper les 60° d’écart à l’objectif du premier bord, et nous voilà arrivés à 17h ( 23 milles nautiques en 6 heures) à l’embossage.

     Petit problème à l’embossage. Michel expose sa stratégie d’une manière très détaillée et on la met en œuvre avec satisfaction puisque les amarres sont passées assez rapidement aux bouées arrière puis avant. Oui mais le filin qui relie les 2 bouées est maintenant passée sous la coque et y reste coincée ! Michel, routeur, skipper, armateur, capitaine, cuisinier en chef et on en passe … va enfiler le costume  d’homme grenouille pour se charger aussi de ce problème. Finalement, et sans mettre la tête sous l’eau, l’aussière sera dégagée facilement du safran. Merci  Michel,  version humaine du couteau Suisse !

     Douche à l’eau minérale Hépar pour nettoyer le «couteau », puis apéro, repas et gros dodo !

Samedi 17 septembre

Après une bonne nuit, direction Concarneau.

     Départ sans soucis de l’embossage. Le vent très faible va nous faire rapidement  lancer le spi.

    Bonne idée, surtout avec la grand-voile positionnée dans l’axe du bateau, on abattra les 17 milles nautiques en 5 heures. On croise quelques trimarans classe ultime ( ACTUAL, SODEBO, SVR-Lazartigue …)

     Une après midi reposante et un « repas des équipages » payé par le capitaine Michel à son équipage Daniel. Bien grands mots vu la taille des effectifs, mais tout de même de très bons plats pris « au Jardin d’Angélina » dans la ville close.

Dimanche 18 septembre

Après une bonne nuit, direction Sainte Marine .

     Presque identique aux conditions de la veille, le vent au portant nous fait utiliser alternativement voiles en ciseaux ou spi.  4 heures pour parcourir 11 milles.

     Une surprise nous attend en soirée avec l’arrivée de la famille Stephan, avec lesquels nous prenons un excellent dîner au « Café du Port » , et un délicieux moment de convivialité.

Lundi 19 septembre

     Ultime étape à rallier : Kérity où nous sommes attendus pour une arrivée au quai à 14h30.

     Conditions de vent toujours confortables que ce soit au près en sortant de Sainte Marine, puis au portant au large du Guilvinec avec spi (*) ou voiles en ciseaux, et enfin au travers dans le chenal de Pénarguer.

(*) une écoute « raccommodée » du spi va claquer lors d’une survente. La prochaine réparation devrait être effectuée avec autre chose que du fil à repriser les chaussettes !

     Pour l’accueil, on est une nouvelle fois gâtés, comme pour le départ.

     En premier contact sur l’eau, c’est Pierre-Yves qui nous rejoint près d’Ar Guisty. Merci à lui, avec son rapide MARPLIJ, il va faire tout son possible pour ne pas nous doubler.

     Ensuite c’est l’entrée dans le port, Albert du bout de la grande digue nous salue et prends ses premiers clichés. Puis on approche de la digue ouest, et retentissent les premières notes des cornemuses et d’un pipeau. Merci Hélène, Claude et Pascale… et merci à tous les autres qui sont là, une vingtaine de personnes, qui applaudissent, qui font coucou, qui crient des bravos… c’est toujours émouvant au retour d’une longue croisière et une belle marque d’amitié.

On n’en mérite pas tant, on a juste fait un tour de bateau ! 🙂

Daniel Derchue

….. le billet d’Alain Blondel en cliquant ICI

et encore …

en bonus …

5 semaines de navigation
5 jours pour les 2 traversées, 20 escales et 10 jours de relâche
860 milles nautiques parcourus (1.600 kms)
200 heures de navigation
Golfe de Gascogne 3 jours 280 milles nautiques
Côtes Nord de l’Espagne 11 jours 112 milles nautiques
Golfe de Gascogne 2 jours 170 milles nautiques
Remontée vers Kérity 18 jours 298 milles nautiques

 


6 commentaires

  1. Aaaah mais s’il y a des passagères clandestines, je veux bien en être la prochaine fois !
    Bravo à tous les 3. et merci pour ce récit de voyage qui donne le goût de liberté.
    Véronique Barla (anonyme aussi)

  2. Superbe ! Magnifiques vacances.
    « Chapeau bas » pour ce remarquable exploit !
    Un grand merci à vous tous, skipper et « associés » pour nous avoir fait partager cet admirable voyage dans le confort de nos appartements, toujours au sec, sans mal de mer….
    Bises Nicole

  3. Bonsoir et bravo pour ce reportage.
    Certains lieux me rappellent ma marche vers Compostelle faite par le chemin de la côte nord de l’Espagne (camino primitivo) avec des paysages magnifiques et une population adorable.
    Amitiés Arnaud

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